Deux générations, une vision identique
Responsable d’équipe, Isabelle Weber prend sa retraite en 2022, après une grande partie de sa carrière dans les soins à domicile. Margot Magnin, 37 ans, incarne la relève. Depuis fin 2020, elle est responsable du développement des prestations. Nous les avons réunies pour évoquer les valeurs d’ASANTE SANA, la concurrence, la limite des soins à domicile et l’autodétermination des patients.
Isabelle Weber, les soins à domicile existent depuis 30 ans. Vous êtes dans le domaine depuis plus de 20 ans. Quelles sont les grandes évolutions?
La technologie, d’abord. L’arrivée des téléphones portables, puis des tablettes, ont amené un confort indéniable. Surtout, le rythme a changé. Par exemple, les séjours à l’hôpital sont plus courts, les aînés restent à domicile plus longtemps. Cela impacte nos activités, nos métiers et notre organisation. Nous réajustons sans cesse les besoins sur le terrain. Margot Magnin: Pour répondre aux besoins de la population et de nos partenaires, la palette des prestations s’est élargie. Nous disposons de spécialistes en santé mentale, d’équipes mobiles de retour à domicile et de nuit. Chez nous, l’interdisciplinarité est une réalité. En même temps, les délais pour opérer les changements sont toujours plus courts, et les gestes toujours plus techniques.
Vous avez des profils et des expériences très différentes. Quelles valeurs partagez-vous?
Margot Magnin: La volonté de servir les clients, de trouver des solutions et d’avancer ensemble, et ce dans des contextes pas toujours faciles. J’ai le sentiment qu’avec ce socle commun, toutes les difficultés peuvent être surmontées.
Isabelle Weber: Je partage ce constat. Malgré la croissance, ASANTE SANA a gardé son âme. L’humain reste au centre de nos priorités. J’ai eu sous ma responsabilité des collaborateurs peu formés, mais avec une grande volonté d’aider les personnes atteintes dans leur santé. Nous devons les encadrer, afin qu’ils puissent, à leur tour, répondre aux attentes des clients.
«Faire alliance, maintenir le lien avec les clients, est essentiel, tout comme le respect mutuel.»
Isabelle Weber
Des nouveaux acteurs sont apparus. Les organisations privées d’aide et de soins à domicile sont-elles complémentaires ou concurrentes?
Margot Magnin: Notre rôle est de nous assurer que tout le monde dans le canton ait accès aux mêmes soins, en terme de volume et de qualité. Nous gérons des troubles cognitifs complexes, nous nous rendons dans des lieux difficilement accessibles. Notre mission n’est pas la même.
Isabelle Weber: Nous sommes un service parapublic et répondons favorablement à toutes les demandes. Que le client vive au centre-ville de Vevey ou à Ormont-Dessous, nous y allons et la facturation de nos services reste identique. Surtout, notre pouvons compter sur 30 ans d’expérience et d’expertise. Nous sommes solides.
Margot Magnin, à quelles nouvelles prestations réfléchissez-vous?
La prévention du déclin fonctionnel est prioritaire. Elle doit encore se renforcer. Nos réflexions s’inscrivent dans la stratégie «Vieillir 2030» du Canton. L’objectif: maintenir l’autonomie des clients le plus longtemps possible. Nous sommes également attentifs au développement des gérontechnologies.
Isabelle Weber: Oui, atténuer, reporter ou alors mieux vivre avec le déclin fonctionnel reste un défi!
7 personnes sur 10 disent vouloir vieillir à domicile, mais certaines situations atteignent les limites du système, non?
Isabelle Weber: Notre rôle n’est pas de décider, mais d’interroger, d’accompagner. Jusqu’où aller? Nous réunissons tous les acteurs autour de la table et évoquons chaque situation. Parfois, il faut un événement grave pour que la personne ou sa famille accepte de parler de l’EMS.
Margot Magnin: Notre rôle est d’accompagner nos clients, de leur permettre d’avancer dans leurs réflexions. J’ai vu des gens qui déjouaient tous les pronostics, parce qu’ils désiraient véritablement rester chez eux. Tant que ça reste sécuritaire, les équipes vont dans le sens du client. L’agilité des professionnels à trouver des solutions m’impressionne.
C’est une réalité avec laquelle il faut désormais compter. Les patients se sont affirmés.
Margot Magnin: L’autodétermination des clients est fondamentale. D’ailleurs, on parle de clients. Lorsqu’on rentre chez quelqu’un, c’est à nous de nous faire accepter. Nos collaborateurs font preuve de tact et, dans la majorité des cas, cela se passe très bien. Au besoin, il faut ajuster.
Isabelle Weber: La population a changé. La notion de «je paie, je désire» imprègne les relations. Faire alliance, maintenir le lien avec les clients est essentiel, tout comme le respect mutuel.
A quelques mois de la retraite, quel bilan tirez-vous, Madame Weber?
Je ressens une grande satisfaction pour le chemin que j’ai parcouru. J’ai confiance pour mon équipe. Ceci dit, il faut être vigilant. Avec la pandémie, les jeunes sont souvent les plus déstabilisés.
Et vous, Margot Magnin? Les défis ne manquent pas. Où allez-vous mettre votre énergie?
Nous faisons face à une augmentation des prestations ces derniers mois dans un contexte de marché du travail tendu. Nous allons relever les défis grâce aux bonnes volontés et aux compétences. Nous avons tout pour bien faire.
«L’agilité des professionnels à trouver des solutions m’impressionne.»
Margot Magnin